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La question syrienne ou les limites du droit d’ingérence

 » Toutefois, le péché de sédition appartient d’abord et à titre de principe à ceux qui excitent la sédition. Ceux-là pèchent très gravement. Secondairement, à ceux qui les suivent, et qui troublent le bien commun. Quant à ceux qui défendent le bien commun en leur résistant, ils ne doivent pas être appelés séditieux; pas plus que ceux qui se défendent ne sont coupables de rixes, nous l’avons dit. (…) Le régime tyrannique n’est pas juste parce qu’il n’est pas ordonné au bien commun, mais au bien privé de celui qui détient le pouvoir, comme le montre Aristote. C’est pourquoi le renversement de ce régime n’est pas une sédition; si ce n’est peut-être dans le cas ou le régime tyrannique serait renversé d’une manière si désordonnée que le peuple qui lui est soumis éprouverait un plus grand dommage du trouble qui s’ensuivrait que du régime tyrannique. C’est davantage le tyran qui est séditieux, lui qui nourrit dans le peuple les discordes et les séditions, afin de pouvoir le dominer plus sûrement. C’est de la tyrannie, puisque c’est ordonné au bien propre du chef, en nuisant au peuple.« 

Saint Tomas d’Aquin à propos du Tyrannicide.

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 Les thèses néolibérales ont décidemment ces derniers temps du plomb dans l’aile. Le concept de droit d’ingérence forgé au tournant des années 70/80 dans ces milieux, de Jean François Revel à Bernard Kouchner, fortement relayé par les intellectuels du quartier latin a pourtant conquis l’ensemble du cercle de la raison, UMPS et journaux de références compris. A la base, un droit naturel qui pourrait primer sur le droit positif des états, un organisme supranational pouvant s’en prévaloir à des fins d’interventions militaires et pour des raisons d’ordre humanitaire.

 Qui a deux trois notions de philosophie politique et d’Histoire des Idées sait combien ce concept est bancal et abusif qui substitue au droit du Tyrannicide des pères de l’Eglise et d’Aristote qui se fondait sur la conduite du bien commun, un bien hypothétique droit naturel de Grotius à Léo Strauss. A la séparation traditionnelle et républicaine du public et du privé, du bien commun et du bien privé dont découlait la souveraineté nationale et populaire on subroge le droit naturel ennemi du droit positif, celui des états, qui fait du néolibéralisme un principe libertarien à la limite mais surtout pas libéral et chrétien. Le glissement est subtil mais bien réel…Il aboutit à l’inverse de la défense des peuples dont il foule au pied la souveraineté. Parti pour venir au secours du peuple et de la souveraineté populaire, il met sous tutelle cette dernière arguant d’un droit naturel qui sera la porte ouverte à toutes les manipulations, à tous les intérêts avançant masqués, à la loi du plus fort finalement, ce que l’on reprochait au tyran et qui fut le déclencheur de l’intervention.

 Faut il une intelligence diabolique pour perdre ainsi le tyran et le libérateur, être dans le mal et dans le principe qui le condamne. Ainsi va la maison du monde qu’elle est divisée contre elle-même et n’en fait alors que plus de dégât sur le plan de la morale comme de l’humain.

Le cas syrien est révélateur comme avant lui la Serbie, l’Afghanistan, l’Irak ou la Lybie. Mais voici que cette fois, le machin onusien se trouve tout nu et découvre des intérêts réels et sérieux qui tendent à s’opposer. La Chine et la Russie ont ainsi mis leur véto à une condamnation du régime syrien, prélude à une intervention militaire occidentale. Le système mondial de gestion des crises est mis à mal au point de faire craindre une conflagration de très grande ampleur. Comme sur le plan financier international, notre monde n’a jamais autant approché le précipice.

Nicolas Stoquer


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